Rémunération au mérite : le dernier rapport MCKinsey

Depuis plus de 10 ans, les questions et le budget alloués à l’Éducation Nationale sont conduits par des politiques qui ne cessent de suivre les préconisations des cabinets de conseils et d'expertises, et dont la vision managériale et libérale ne cesse de démanteler les fondements même du service public d'éducation.

Dans le récent rapport du cabinet de conseil Mc Kinsey, publié le 11 janvier 2023, on ne cache même plus le rapprochement - si ce n'est le basculement - voulu entre le monde de l'entreprise et celui de l'école.

En effet, ce rapport très onéreux (puisqu'il a couté la bagatelle de 500 000 d'argent public) défini pour le ministère de l’Éducation Nationale un axe de prédilection : la rémunération différenciée des professeurs. Ce dispositif aurait le mérite de rendre les enseignant-es plus efficient-es en visibilisant ceux et celles " moins performant-es". Car, selon ce cabinet,  si investir dans l’École offre de " multiples externalités positives", il faut la transformer pour aller vers les modèles d'éducation internationaux, qui permettraient aux personnels de l’Éducation de percevoir l'impact de leur travail sur les résultats de l'entreprise.

Augmenter massivement les salaires des personnels n'y répondrait pas, il faut bien évidemment leur rappeler, en toute bienveillance, qu'en l'état actuel des choses iels ne sont que des "feignasses toujours en grève ou en vacances" ne méritant pas d'être rétribué-es de façon juste pour leur niveau de diplôme et le temps passé pour leur mission.

Dans cette division du travail, où chacun-e sera en concurrence directe avec son/sa collègue deux scénarii sont à l'étude : récompenser par une prime collégiale un établissement (+4% du salaire brut et chèque cadeau), ou récompenser personnellement un agent-e (à hauteur de 10% de l'effectif d'un établissement). A l'heure où les salaires ne sont toujours pas revalorisés et où de plus en plus de collègues ont des difficultés à boucler les fins de mois, cette mesure vise à soumettre les équipes aux respects des injonctions pédagogiques et à travailler toujours plus pour espérer atteindre le haut du podium.

A bon élève la carotte, à élève dissident le bonnet d'âne.

Quant au pouvoir de décision des enseignant-es il tombe sous le coup d'un "modèle de gestion" qui privilégie "un leadership clair"...Ce qui sous-entend que les décisions des équipes pédagogiques, concernant les apprentissages et le fonctionnement des établissements, seront éradiquées au profit de méthodes imposées par un-e chef-fe dont l'autorité s'appuiera davantage sur des objectifs à atteindre que sur ses expériences de terrain.

Bref un rapport qui n'invente rien au vu de son coût, puisque l'Education est contaminée depuis longtemps par la méritocratie néo-libérale, mais qui marque définitivement le virage politique de notre ministère actuel contre un modèle d'Ecole public émancipateur et contre les conditions de ses agent-es.